Quels sont (et seront) les impacts du changement climatique sur notre santé ?

Par : Alicia Kempeneers

Publié le   |  Temps de lecture :

Conséquences du changement climatique sur la santé

Cette année, pour la première fois depuis le début des COPS, la COP28 eut un jour dédié aux enjeux sanitaires liés à la crise climatique. Il aura donc fallu un certain temps pour que l’on considère les conséquences du changement climatique sur la santé. Pourtant, plus les années avancent, plus on commence à constater les impacts du changement climatique sur la santé physique, mais aussi mentale.  

 

Pourquoi le changement climatique a-t-il un impact sur la santé ?

Le changement climatique affecte la santé de diverses manières. Il est la cause de décès et de maladies dus à des phénomènes météorologiques extrêmes de plus en plus fréquents (vagues de chaleur, tempêtes, inondations, etc.).

Ces phénomènes ont pour conséquences de perturber les systèmes alimentaires, augmentant les maladies liées à l’alimentation, mais aussi de compliquer aussi l’accès à une eau de qualité. Ce n’est pas tout, il accentue le développement de certaines maladies vectorielles (maladies humaines causées par des parasites, virus ou des bactéries qui sont transmis par des organismes vecteurs comme des insectes), ainsi que les problèmes de santé mentale (anxiété, stress post-traumatique, etc.).

Les conséquences du changement climatique compromettent également des facteurs sociaux de santé comme l’accès à des moyens de subsistance, l’égalité et l’accès aux soins de santé.

 

Quelles sont les conséquences sanitaires directes du changement climatique ?

Les conséquences directes du changement climatique sont principalement liées à l’apparition de phénomènes climatiques extrêmes tels que des inondations comme on en a connu en 2021, des vagues de chaleur, des tempêtes, des incendies (pouvant impliquer une aggravation des maladies cardiaques ou respiratoires), etc.
Parmi toutes ces conséquences néfastes, les vagues de chaleur se distinguent par leur impact très direct sur les populations. Elles sont à l’origine de diverses conséquences sur la santé, telle que de la déshydratation, des coups de chaleurs, de l’épuisement, etc.
À titre d’exemple, lors de l’été caniculaire de 2003 en Europe, on avait enregistré près de 60% de surmortalité selon Santé Publique France. Cela représentait près de 70.000 morts sur l’ensemble du continent. En Belgique, on estimait à l’époque une hausse de la mortalité d’un peu plus de 5% durant le deux premières semaines d’août (9). Plus récemment, on se rappelle de l’été particulièrement chaud de 2022 durant lequel Sciensano avait enregistré une surmortalité de 5,7% (à mettre en perspective avec les morts dues au COVID-19). (15)

Les enquêtes réalisées à la suite de ces épisodes de chaleur montrèrent que ce sont les personnes âgées qui furent les plus touchées. Elles notent également que les personnes peu autonomes ou souffrant d’un handicap physique ou parfois mental ont également constitué un public très à risque.

Et si l’on s’en tient aux projections actuelles, il semblerait qu’un tel événement soit voué à se reproduire. Selon météo France, dans l’optique où l’on stabiliserait nos émissions de GES, il est prévu que dans 20 ans, en 2043, la probabilité d’un épisode aussi chaud que celui de 2003 augmentera de cinq fois par rapport à 2023. Un tel épisode serait alors plus chaud de 2,2°C que celui de 2003 étant donné la hausse de la température moyenne.

Conséquences du changement climatique sur la santé

Conséquences du changement climatique sur la santé

Qui plus est, selon un rapport de l’IRM datant de 2020, si la trajectoire actuelle de nos émissions de gaz à effet de serre n’est pas modifiée, à Bruxelles en 2100, le nombre de vagues de chaleur pourrait tripler, leur intensité doubler et leur durée augmenter de moitié. On pourrait par ailleurs observer ces modifications déjà vers la seconde moitié du siècle avec, quel que soit le scénario, au moins une vague de chaleur par été (13).

 

Quelles sont les conséquences sanitaires indirectes ?

Les conséquences indirectes du changement climatiques sont, si moins visibles, pas pour autant moins importantes, au contraire.
Tout d’abord, le changement climatique met en péril l’approvisionnement en nourriture et en eau de certaines régions du monde. Cela, en plus d’augmenter les cas de malnutrition et de déshydrations, augmentera les risques liés à la qualité de l’eau et aux intoxications alimentaires.

 

Maladies liées à l’alimentation

Les phénomènes naturels extrêmes ont notamment pour conséquences de perturber les systèmes alimentaires. Le changement climatique ayant des conséquences directes sur les cultures, cela se répercute directement sur les rendements des producteurs. Qu’ils soient agriculteurs, aquaculteurs, pêcheurs ou éleveurs, tous seront peu à peu forcés d’adapter leurs pratiques. (6)

Toutefois, quoiqu’il en soit, le changement climatique nous confrontera de manière presque inéluctable à des bouleversements au niveau de nos systèmes d’approvisionnement en nourriture, et ce en raison de l’augmentation de la fréquence des phénomènes météorologiques extrêmes. (7) Ainsi, les principales conséquences de ces bouleversements sur les populations seront liées à l’augmentation du nombre de famines.

 

En outre, en raison des variations de températures importantes, on pourrait également connaitre une recrue d’essence du nombre de maladies alimentaires liées à de mauvaises conditions de conservations des aliments (Prolifération de la bactérie salmonella par exemple).

 

Maladies liées à l’eau

Le changement climatique est également à la source, sans mauvais jeu de mots, de nombreux problèmes liés à l’approvisionnement en eau. Avec l’augmentation des températures, le cycle de l’eau s’en voit perturbé. Les sécheresses se multiplieront, exposant dès 2025 près de 38% de la population mondiale à un stress hydrique (situation où la demande en eau surpasse les réserves disponibles). Cette situation rend une grande partie de la population terrestre vulnérable. En 2050, cela pourrait être jusqu’à 5,7 milliards de personnes pour qui l’eau deviendrait une ressource rare au moins une fois par an. (11)

Dans d’autres régions du monde, le problème inverse se pose. En raison de l’augmentation des précipitations, on risque de voir le nombre de maladies liées à l’épuration de l’eau se répandre. Des crues à répétition pourraient endommager certaines stations d’épuration et ainsi mener à l’émergence de maladies transmises par l’eau, telles que le choléra et la dysenterie. Mais les inondations ne sont pas les seuls phénomènes naturels comportant des risques pour ces infrastructures. En cas de sécheresse, l’eau stagnant dans les cuves pourrait endommager les infrastructures et augmenter les concentrations de certaines bactéries nocives pour l’humain (14).

 

Augmentation du risque de maladies vectorielles

Dans les régions touchées par des changements climatiques importants (perturbation du rythme des saisons, hausse des précipitations, etc.) peuvent augmenter le risque de propagation de maladie portées par des vecteurs de transmission comme le moustique ou la tique. On peut citer le paludisme, la dengue ou encore la maladie de Lyme.

L’organisation mondiale de la santé estime que ces maladies causent aujourd’hui 700.000 décès par an, cela risque d’énormément augmenter à l’avenir. Et bien que ces maladies n’aient pas toutes des conséquences mortelles, elles nécessitent toutefois un traitement. Or pour faire face à l’augmentation probable des cas à venir, il est nécessaire de prévoir une réponse efficace des systèmes de santé. (2)

 

Augmentation des troubles respiratoires et allergiques

Les troubles allergiques devraient également augmenter en raison des changements saisonniers, les pollens allergènes se propageant plus tôt en cas de réchauffement de températures. C’est en tout cas la conclusion que tire Sciensano qui décrivait la saison pollinique de 2023 comme « anormalement précoce ». La hausse des températures exerce une pression sur le cycle de reproduction des arbres, les poussant à produire de plus en plus de pollen, et ce, de plus en plus tôt. (12)

Parallèlement à cela, la hausse des concentrations d’ozone dans l’atmosphère est déjà responsable d’une augmentation des décès prématurés chaque année, et le changement climatique pourrait aggraver les pics d’ozone dans de nombreuses régions d’Europe occidentale. Une trop grande concentration d’ozone dans l’air peut provoquer une irritation des voies respiratoires et provoquer des problèmes pulmonaires, voire aggraver certains troubles pulmonaires ou cardiaques.

 

Qui sont les publics les plus à risque ?

On peut identifier plusieurs catégories de populations plus à risque face au changement climatique. Les groupes les plus faciles à identifier sont ceux qui se basent sur l’âge ou l’état de santé. Les personnes âgées, les nourrissons, les patients souffrants de maladies chroniques et les personnes avec un autonomie diminuées sont très clairement identifiées comme pouvant souffrir directement des impacts du changement climatique. Toutefois, le critère de la condition physique n’est pas le seul à prendre en compte.
La capacité d’adaptation aux conséquences du changement climatique varie également d’une région à l’autre, mais pas seulement. La santé est avant tout étroitement liée aux conditions socio-économiques des populations. Or le changement climatique risque d’aggraver ces disparités et inégalités.

Comme le souligne les Nations Unies, les personnes et les pays les plus défavorisés sont souvent plus vulnérables face aux conséquences du changement climatique. Les individus les plus marginalisés rencontrent en effet de nombreux obstacles pour accéder aux soins de santé et aux mesures préventives. Les inégalités de santé initiales amplifient ainsi les dangers liés au changement climatique, sans compter que cette situation continuera d’empirer avec la hausse des températures. (2)

 

Et face à tout cela, que fait-on ?

L’avenir réserve donc un double enjeu au monde de la santé : celui de l’adaptation à ces nouveaux enjeux et à leurs questions, le tout dans un contexte de décarbonation du secteur.
Face à l’importance de ces challenges, naissent heureusement des initiatives qui visent à permettre d’appréhender ces menaces et de rendre nos systèmes de santé plus résilients.
On peut par exemple citer le groupe belge Health for Future qui agit pour la sensibilisation du secteur de la santé aux enjeux climatiques, ou encore la Société Scientifique de Médecine Générale qui permet aux médecins généralistes de se former à ces questions.

 

 

Sources

(1) Conséquences sur la santé, climat.be
(2) Changement climatique et santé, Organisation Mondiale de la Santé  (OMS)
(3) Il y a 20 ans, la canicule 2003, météo France
(4) La vague de chaleur d’août 2003 : que s’est-il passé ?, santé publique France
(5) Les effets du réchauffement climatique sur la santé : Les pays en développement sont les plus vulnérables, Nations Unies
(6) Le changement climatique et ses répercussions sur les politiques de l’agriculture et de la pêche, OCDE
(7) Les scientifiques mettent en garde sur l’impact du changement climatique sur la sécurité alimentaire et les océans, Parlement européen
(8) L’eau – au cœur de la crise climatique, Nations Unies
(9) La canicule de 2003 a tué en Belgique, La Libre
(10) Réchauffement climatique : quelles conséquences sur l’eau ?, le centre d’information sur l’eau
(11) Note de politique d’ONU-Eau sur le changement climatique et l’eau, Onu
(12) La saison pollinique 2023 a démarré avec la floraison des aulnes et des noisetiers, Sciensano
(13) Rapport climatique – 2020, IRM
(14) Conséquences des changements climatiques sur les systèmes d’assainissement, Revue des Sciences  Techniques et Méthodes

(15) La (sur)mortalité durant l’été 2022, Sciensano